« Dans la petite chambre enrubannée de coussins et d’estampes. Dans les mystères du jour, je songe. Prisonnière à peu près de mes livres, de mes rêves les plus secrets d’où je m’évade pour faire preuve d’existence visible, en dansant, en criant, en dînant un peu partout ! Je joue des cymbales pour réveiller l’enchantement. Je joue du cor au fond des bois, je poursuis l’éternelle chasse, mâchant des feuilles amères, des lotus et des violettes d’automne. Et l’amour me poursuit malgré moi parce qu’il est le péage de mes vingt ans, le tribut de l’adolescence et de l’espoir. » Mireille Havet (Le [mercredi] 10 septembre 1919. Journal 1919-1924, Éd. Claire Paulhan, 2005)
Ainsi commence le second volume du Journal tenu par Mireille Havet de 1913 à 1929. Depuis la découverte de ces milliers de pages, cahiers et feuillets épars miraculeusement préservés qui forment une extraordinaire autobiographie, Claire Paulhan, édi- trice passionnée et attentive au moindre détail de l’écriture, se charge de leur publication. Un premier extrait (1918-1919) qui représente une année dans la vie de l’auteur, celle de ses vingt ans, est paru en 2003. Le second volume, édité aujourd’hui, est aussi la période où Mireille Havet a écrit Carnaval, roman « dans l’air du temps », évoquant de manière cryptée sa brève passion pour la comtesse Madeleine de Limur. Publié en 1922 dans Les Œuvres libres puis l’année suivante par Albin Michel, Carnaval est à nouveau en librairie grâce à Claire Paulhan dont l’édition enrichie de nombreuses lettres et articles de presse rend hommage aux témoignages de l’époque.
Nathalie Jungerman