« Dès le premier jour, dès la première lettre, tu as su. Tu as compris que la peinture et l’écriture seraient à jamais notre lieu de rencontre, le tissu même de notre vie partagée », écrit Alice Baxter à Frédéric Benrath, après son décès en avril 2007.
Au cœur de cette correspondance croisée, intitulée Ces petits tas d’ombres et de lumière, se trouvent la création artistique, la peinture et l’écriture. « Je suis persuadé que l’écriture et en ce qui me concerne la correspondance est le processus qui déclenche la réflexion, la remise en cause, en un mot ce qui me tue et me fait renaître à autre chose. », affirme le peintre dans une lettre datée de 1975. Le volume, publié par L’Atelier contemporain avec le concours de la Fondation La Poste, réunit plus de cinq cents lettres et cartes postales, échangées durant près de quarante ans (1969-2007) entre Frédéric Benrath et Alice Baxter. Tous deux ont pris des pseudonymes. Philippe Gérard signe, à partir de 1954, du nom qu’il a choisi en référence au château de Benrath, près de Düsseldorf, et aux trois figures de la culture allemande qu’il admire : le philosophe Friedrich Nietzsche, le poète Friedrich Hölderlin et le peintre Gaspard D. Friedrich. Quant à Michèle Le Roux, enseignante et critique d'art, son correspondant la rebaptise « Alice » le 5 avril 1976, après une conversation avec Jean-Noël Vuarnet qui travaillait sur le roman de Lewis Carroll. L'année suivante, elle emprunte le nom Baxter au film Véra Baxter de Marguerite Duras. Ils se rencontrent grâce à un ami peintre qu’Alice Baxter accompagne à un dîner organisé par Benrath dans sa maison de vacances, en Normandie. Elle est éblouie par un de ses tableaux...
Leur correspondance, tenue longtemps secrète, est merveilleuse, passionnante. Elle est parcourue de références picturales et littéraires, de citations d’écrivains, poètes ou philosophes. Chaque lettre attise la réflexion. L’édition comporte une préface de Christopher Lucken, un avant-propos et des écrits d’Alice Baxter sur l’œuvre de Benrath, une postface d’Anne de Staël et des reproductions en couleurs.
Édito