FloriLettres

Édito janvier 2021. Par Nathalie Jungerman

De la carte à Dada. Photomontages dans l'art postal international

Édito

Les éditions du Sandre ont publié le mois dernier, avec le soutien de la Fondation La Poste, De la carte à Dada. Photomontages dans l’art postal international (1895-1925). Le format à l’italienne, la qualité des nombreuses reproductions (près de 500) et l’étude approfondie de Carole Boulbès, docteure en Arts et sciences de l’art, en font un très bel ouvrage. Les recherches menées par l’auteure sont nées d’un intérêt pour la singularité du montage photographique des dadaïstes et pour les cartes postales fantaisie du début du XXe siècle qui exploitaient déjà la technique du photomontage. « Ce fut un choc de découvrir qu’en Suisse, en France et en Allemagne des avant-gardistes avaient défié les lois du bon goût et de la raison en confectionnant au hasard des poèmes sonores, des peintures de machines, des collages à partir de bribes de journaux, de photographies, de reproductions de revues. (…) Lorsque j’ai découvert par hasard des cartes fantaisie postées en 1903 qui recouraient déjà à cette technique, mon intérêt a été aiguisé. »
Carole Boulbès montre comment la carte, ce support de correspondance très usité, à la fois « objet intime, familier et œuvre d’art qui ne dit pas son nom », est devenue, grâce à son petit format et son faible coût, un commerce florissant, et mondial, prisée à la fois par les amoureux, les artistes, les écrivains mais aussi par les hommes de pouvoir et les partis politiques qui s’en sont servis comme instruments de propagande ; par exemple en Allemagne, pendant la Première Guerre mondiale ou lors de la Révolution russe. Un outil de communication commandé « par les exploiteurs pour distraire les exploités », comme le disait si bien Paul Éluard, par ailleurs grand collectionneur de cartes fantaisie. L’auteure pointe également nombre de montages insolites, curieux, parodiques, souvent kitsch, où portraits, paysages, machines, animaux et végétaux se mêlent, où les femmes, les hommes, les enfants sont mis en scène dans des postures cocasses, et dont les silhouettes sont étirées ou multipliées…