FloriLettres

Édito été 2016. Par Nathalie Jungerman

Écrivains en guerre - Exposition du 28 juin au 16 novembre 2016

Édito

« Pas de pardon. Courage. Des galeries, on tire, grenades à main dedans. Hurlements. Par-dessus le remblai. En attrape un au collet. Haut les mains ! Par bonds, derrière le rouleau de feu. Estafette une balle dans la tête. Assaut au nid de mitrailleuses. Homme derrière moi tombe. » Ernst Jünger, Journaux de guerre, tome I : 1914-1918, Gallimard, coll. La Pléiade, 2008.

Ernst Jünger a combattu en première ligne dans la bataille de la Somme (1er juillet - 18 novembre 1916). Entre les notes qu’il consignait dans ses carnets sur le vif et les livres écrits à partir de ces pages, « il y a toute la distance qui sépare l’action de la littérature ». En 1992, l’écrivain allemand, alors âgé de 97 ans, revenait sur les lieux participer à l’inauguration de l’Historial de la Grande Guerre à Péronne, un musée qui propose une histoire culturelle comparée (Allemagne, Grande-Bretagne, France) du premier conflit mondial. Du 28 juin au 16 novembre 2016, l’Historial présente, avec le soutien de la Fondation La Poste, une exposition Écrivains en guerre. 14-18. « Nous sommes des machines à oublier », conçue et réalisée par Laurence Campa, universitaire, spécialiste de poésie et littérature française du XXe siècle, et par Philippe Pigeard, poète, compositeur et performer dont les récentes créations portent sur la « poésie la guerre ». Les deux commissaires ont choisi, à l’image de l’Historial, de traiter des trois principaux belligérants en sélectionnant des écrivains français, britanniques et allemands présents sur le front de la Somme (Vaché, Cendrars, Sassoon, Tolkien, Stramm, Jünger, pour ne citer qu’eux). L’exposition propose une approche plus littéraire qu’historique. Elle se divise en huit sections dont les quatre premières s’intitulent « Vivre », « Choisir », « Survivre », « Combattre ». Le parcours simule une tranchée dans laquelle sont exposés lettres et manuscrits, éditions rares, photographies, eaux-fortes (d’Otto Dix), encres (d’André Masson) et objets, tout un ensemble de documents qui tissent l’histoire singulière de chaque personnage. Sur un mur, derrière les parois, sont projetées des images vidéo en noir et blanc, contrastées, parfois presque abstraites, où l’on distingue des combattants, des explosions, la plaine à perte de vue. Des éléments sonores, des bruits de déflagration, une vibra- tion, un tremblement de l’air enveloppent le visiteur. Celui-ci a la possibilité de lire, entendre, regarder ou encore, écouter la lecture d’un texte. L’exposition ainsi conçue permet une immersion dans « l’univers mental et créatif » de ces écrivains embarqués dans la brutalité et l’absurdité du conflit. Le catalogue publié sous la direction de Nicolas Beaupré est une coédition Gallimard/Historial de la Grande Guerre.