FloriLettres

Édito mai 2017. Par Nathalie Jungerman

Brassaï & Roger Grenier - Correspondance 1950-1983

Édito

« J’ai vu Brassaï écrire, toujours, de plus en plus, jusqu’à l’essai sur Proust et la photographie qui a accaparé les dernières années de sa vie. Son premier texte en français est un article sur le cimetière des chiens pour le magazine Vu. » *

Brassaï ne s’est pas limité à un seul moyen d’expression. Certes, ses photographies d’un Paris nocturne et secret l’ont rendu célèbre et il appartient désormais à l’histoire de cet art, mais il a aussi accompli une œuvre d’écrivain, de peintre, de dessinateur, de cinéaste et de sculpteur. Né en 1899 à Brassó (Brasov) dans la partie hongroise de la Roumanie, il s’installe à Paris en 1924 pour être peintre. Il mène la vie de bohème à Montparnasse, devient l’ami des artistes qu’il photographie, se lie à Henry Miller, Jacques Prévert, Henri Michaux, Picasso... En 1948, il est naturalisé français, se marie avec Gilberte Boyer rencontrée trois ans plus tôt. Elle est une amie d’adolescence de Roger Grenier grâce à qui elle travaille comme documentaliste pour l’un des deux hebdomadaires dont le journaliste s’occupe depuis la Libération. Son union avec Brassaï rapproche les deux hommes. Ils seront étroitement liés jusqu’à la mort du photographe en 1984. Les éditions Gallimard viennent de publier, avec le soutien de la Fondation La Poste, leur correspondance inédite, précédée d’un très beau texte de Roger Grenier intitulé Brassaï et les lumières de la ville. La plupart des lettres et cartes postales sont de Brassaï et Gilberte, celles de Roger Grenier n’ont pas toutes été retrouvées. Malgré ce manque, le ton est celui de la conversation. La spontanéité de l’écriture qui rend présents les correspondants rappelle le livre que Brassaï a réalisé avec Picasso, Conversations avec Picasso (Gallimard, 1964), nourri de réflexions sur l’art, dans lequel il raconte bon nombre d’anecdotes et accorde une place au discours des amis et familiers du peintre... Écrivain, éditeur et homme de radio, spécialiste de Tchekhov et passionné de photographie, Roger Grenier est un des plus grands témoins de la vie littéraire du XXe siècle. Il a fait partie de la première équipe de Combat, aux côtés d’Albert Camus. Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, il a vingt ans.

Sept ans après le premier entretien que nous avions réalisé à l’occasion de la sortie de son ouvrage, Dans le secret d’une photo**, Roger Grenier nous reçoit dans son appartement rempli de livres, situé non loin des éditions Gallimard. À la fin de notre conversation, Nicole, son épouse, dépose sur la table des tirages originaux de Brassaï...

 

*Roger Grenier, Brassaï et les lumières de la ville
(Correspondance 1950-1983, Gallimard, 2017).

** FloriLettres n° 114, avril 2010 - « Roger Grenier, Dans le secret d’une photo »