« Même quand les artistes sont maladroits, quand leurs pensées sont confuses, quand leurs gestes sont inaboutis, les performances disent obstinément quelque chose de vrai. » Nathalie Léger, La robe blanche.
En novembre dernier, le jury tournant du prix Wepler-Fondation La Poste constitué d’un libraire, d’un postier, d’une détenue, de deux critiques littéraires, de lecteurs, et présidé par Marie-Rose Guarnieri, a récompensé deux livres captivants publiés aux éditions P.O.L : La robe blanche de Nathalie Léger et Série noire de Bertrand Schefer qui a reçu la mention spéciale. Nathalie Léger, directrice générale de l’IMEC (Institut Mémoires de l’édition contemporaine) est l’auteur d’un essai, Les Vies silencieuses de Samuel Beckett (Allia, 2006) et de deux autres romans parus chez P.O.L, L’Exposition (2008) et Supplément à la vie de Barbara Loden (2012). La robe blanche raconte l’histoire de Pippa Bacca, une jeune italienne, artiste, performeuse qui a décidé d’aller de Milan à Jérusalem en auto-stop, vêtue d’une robe de mariée, pour promouvoir la paix, réparer la souffrance des hommes face au désastre de la guerre. Elle part le 8 mars 2008. Le 31 mars, elle disparaît à Gebze en Turquie, où son corps est retrouvé une dizaine de jours plus tard. Pippa Bacca a été violée et assassinée par un homme qui l’avait prise en auto-stop. Nathalie Léger mène une enquête sur cette femme, interroge son geste artistique, se demande pourquoi assigner à l’art une intention généreuse... « Revenant de son long périple, plus que sa seule robe blanche (...), c’est l’original de la bonté et du courage qu’elle aurait tenté d’exposer. » Au récit du destin tragique de cette artiste introduit par une citation d’Imre Kertész extraite du Chercheur de traces « Je suis venu pour réparer cette injustice (... ) » se mêle une autre histoire, celle de la mère de la narratrice qui lui demande de réparer par l’écriture une injustice qu’elle a subie...
Philosophe de formation, réalisateur et traducteur, Bertrand Schefer se penche, avec Série noire, sur un fait divers : le rapt, en avril 1960, du petit-fils du président de la firme automobile Peugeot. La France connaît à cette époque sa première affaire d’enlèvement d’enfant contre rançon. Bertrand Schefer s’appuie sur de nombreux documents dont un rapport judiciaire inédit pour reconstituer l’histoire des ravisseurs qui se sont inspirés d’un polar américain traduit dans la collection « Série noire ».
« Pour une fois, c’est le roman qui inspire le fait divers. » Au-delà de cet événement qui a défrayé la chronique pendant un an, l’auteur s’intéresse au statut de la littérature, du roman, aux liens entre fiction et réalité, au Paris des années soixante et à son atmosphère particulière, au cinéma, à la treizième édition du festival de Cannes présidée par Georges Simenon...